Dans cet article, nous proposons une alternative à la méthode de résolution de problèmes la plus populaire et la plus intuitive pour tester différentes solutions, l'une après l'autre, dès qu'elles viennent à l'esprit.
Supposons que sur le trajet de vos vacances, votre voiture tombe en panne. Vous pourriez faire appel à l'assistance et attendre que votre voiture soit remorquée. Mais supposons que vous souhaitiez tenter de résoudre le problème par vous‐même ou évaluer le coût des réparations à l’avance. Des pannes mécaniques peuvent se produire pour un grand nombre de raisons.
Intuitivement, face à un problème complexe, nous avons souvent tendance à tester différentes solutions, les unes à la suite des autres, dès qu'elles viennent à notre esprit.
Dès lors que nous réalisons qu'une solution ne fonctionnera pas, nous passons à la prochaine solution envisagée et ainsi de suite.
C’est ce que nous appellerons une approche de type « un facteur‐à‐la‐fois », une démarche très intuitive, très répandue dans les entreprises, utilisée pour résoudre des problèmes complexes. Les différents paramètressont testésindividuellement, les uns aprèsles autres, jusqu'à ce que le problème soit résolu.
Dans un plan d’expériences cependant, l'approche est complètement différente.
Plusieurs niveaux des paramètres sont modifiés simultanément, selon un plan/matrice des essais, et tous les facteurs sont étudiés ensemble. Il ne s’agit plus simplement de trouver une solution mais aussi de comprendre et de modéliser le procédé, comme représenté ci‐dessous :
Schéma explicatif de l’approche du plan d’expériences
Tableau 1 ‐ Plan d’expériences dans Minitab pour spécifier toutes les combinaisons des niveaux des facteurs, pour chaque essai expérimental
Pourquoi un plan d'expériences est‐il préférable à la modification d’un facteur à la fois ? Et quels sont les avantages des plans d’expériences par rapport à des démarches plus intuitives ?
Précision des effets estimés (démarche primordiale à effectuer en premier lieu)
Dans un plan d’expériences, pour chaque facteur, nous pouvons calculer un effet moyen à partir des essais qui ont été effectués (une moyenne pour les essais au niveau bas d'un facteur et une moyenne pour les essais au niveau haut de ce facteur).
L'effet d'un facteur à deux niveaux représente donc la différence entre la moyenne pour le niveau bas et la moyenne pour le niveau haut de ce facteur. Par conséquent, dans un plan d’expériences, nous pouvons comparer des moyennes à d'autres moyennes plutôt que les valeurs individuelles (contrairement à de simples « manips » et explorations de type « un facteur‐à‐la fois »). Cela nous permet d'atteindre un meilleur niveau de précision dans les estimations des effets, pour un nombre donné d'essais.
Tableau 2 ‐ Plan d’expériences à 3 facteurs, 2 niveaux
Estimation de l’effet de A : L’effet de A est la différence entre la moyenne des essais au niveau + de A et la moyenne des essais au niveau – de A.
Les facteurs influents sont beaucoup plus susceptibles d'émerger par rapport au bruit environnemental (qui représente l'erreur expérimentale, la variabilité résiduelle etc ...). L’erreur expérimentale dans un plan d’expériences peut représenter :
Même si un facteur n’a aucun effet réel, l’effet mesuré sera différent de 0, ceci est dû d’une part à ces variations environnementales pendant les essais et, d’autre part, à l’erreur expérimentale ; mais les facteurs dont l’effet est réellement significatif se détacheront clairement, comme l’illustre parfaitement le diagramme de Pareto ci‐dessous
Graphique 1 ‐ Diagramme de Pareto dans Minitab. La ligne de significativité permet de séparer les facteurs dont l’effet est réel (facteurs dépassant la ligne rouge) de ceux dont l’effet est uniquement dû à l’erreur expérimentale et au bruit de fond (facteurs ne dépassant pas la ligne rouge).
Puisque les plans d’expériences fournissent des estimations beaucoup plus précises, cela peut aussi permettre de compenser un manque de précision dans le système de mesure, par exemple.
La possibilité d'estimer les interactions entre les facteurs est un autre atout majeur des plans d’expériences.
L'effet du facteur A, par exemple, peut être plus grand lorsque le facteur B est fixé, générant une interaction (« effet de couplage » dû à des synergies ou antagonismes entre facteurs). Un exemple bien connu d'une interaction, souvent cité dans les ouvrages, est l'effet de l’interaction entre alcool et somnifères sur la distance de freinage d'une voiture.
Supposons qu'un automobiliste décide de mesurer l'effet de l'alcool, et donc de boire une grande quantité d'alcool, sa distance de freinage (et le temps de réaction) augmentera considérablement. Supposons que le même automobiliste ait décidé également de tester l’effet de somnifères. Les somnifères et l'alcool interagiront certainement conduisant à un effet qui est beaucoup plus grand que la simple addition de l'effet des somnifères plus l'effet de l'alcool. Il s’agit d’une interaction entre deux facteurs.
Bien sûr, modifier un facteur à la fois ne vous permettra jamais d'identifier ces interactions, mais dans un plan d’expérience elles seront prises en compte.
Graphique 2 – Le facteur température a un effet négatif, beaucoup plus important pour une durée faible que pour une durée élevée, il s’agit bien d’une interaction significative.
Dans un plan d’expériences, chaque niveau de chaque facteur est associé autant de fois à chaque niveau de chacun des autres facteurs, ce qui conduit à un plan avec des combinaisons de niveaux complétement équilibrées. Ceci permet d'estimer les effets de chaque facteur indépendamment des effets de tousles autresfacteurs. Les estimations des effets de chacun desfacteurs ne sont pas biaisées par d'autres facteurs.
Il s’agit d’un avantage important, car si plutôt que de procéder à un plan d’expériences équilibré, nous considérions de simples données historiques observées (à partir d'une base de données par exemple), et, que par malchance, un paramètre changeait en même temps qu'un autre paramètre, il deviendrait très difficile de séparer ces effets et, que par malchance, un paramètre changeait en même temps qu'un autre paramètre, il deviendrait très difficile de séparer ces effets (les variables prédictrices seraient corrélées entre elles et s’influenceraient mutuellement). Un plan permet donc d'estimer réellement l'effetspécifique de chaque facteursans biais etsans que les paramètres ne soient corrélés entre eux.
L’analyse des corrélations (ci‐dessous) entre les différents facteurs d’un plan factoriel indique que les coefficients de corrélation sont égaux à 0 (il n’existe aucune corrélation donc aucune liaison et aucun biais entre ces variables prédictrices) :
Pour conclure, l'approche un facteur à la fois, bien que répandue et intuitive, n’est pas un moyen très efficace de résoudre les problèmes, sauf s’il s’agit d’un problème très simple. Il est toujours préférable d'effectuer un plan d'expériences plutôt que d’étudier chaque facteur à la suite de l’autre.